🌮Quel artiste a fait 100 Olympia sans jamais passer à la télé ni à la radio ?

1. Pour une fraction de seconde

Je viens de terminer Pour une fraction de seconde, une bande dessinée de Guy Delisle consacrée à l’étonnant destin d’Eadweard Muybridge, pionnier de la photographie en mouvement.

J’aime beaucoup le trait épuré de Delisle, que j’avais découvert dans Chroniques birmanes. Ici, on retrouve son humour subtil, qui rend la lecture aussi légère qu'instructive. On apprend des choses sans s’en rendre compte !

ATTENTION SPOILER - si vous ne voulez pas connaître l’histoire de la BD, ne lisez pas ce paragraphe ! 

Au cœur du récit, une commande improbable : capturer le galop d’un cheval, lancé à pleine vitesse. Leland Stanford, magnat des chemins de fer et passionné de chevaux, engage Muybridge pour prouver qu’à un moment donné, les 4 sabots quittent bien le sol. Ce défi technique aboutira à une série de clichés révolutionnaires, posant les bases de la décomposition du mouvement, du cinéma, et, plus tard, de procédés emblématiques comme le “bullet time” popularisé dans Matrix.

Ce qui rend cette histoire si remarquable à mes yeux, c’est la rencontre entre 2 hommes habités par la même obsession de la précision, chacun avec une approche radicale dans son domaine. Je n’avais jamais entendu parler d’Eadweard Muybridge avant d’ouvrir cette BD, et j’ai trouvé sa vie passionnante !

Art, science et folie visionnaire : quelle aventure !

2. Etre humain en 2035

J’adore la discipline de la prospective qui vise à anticiper les évolutions possibles du futur pour mieux orienter les choix et décisions dans le présent. J’aime bien lire sur ce sujet car il mélange imaginaire et réalité. Un peu comme si c’était de la science-fiction plausible.

Dans cette perspective, le centre de recherche académique Imagining the Digital Future Center d’Elon University (aux États-Unis), a publié le 2 avril 2025 un rapport, Being Human in 2035. Ce document s’appuie sur les réponses de 301 experts internationaux, interrogés sur l’avenir des capacités humaines à l’ère de l’intelligence artificielle. A priori, ça semble plutôt sérieux.

Je n’ai pas lu l’intégralité des 285 pages, mais j’en ai parcouru des extraits ainsi qu’un résumé. Voici dans les grandes lignes ce que j’en retiens :

Selon le rapport, 61 % des experts estiment que nous allons assister, d’ici 2035, à des transformations « profondes et significatives », voire « fondamentales et révolutionnaires », dans la plupart des capacités humaines de base.

Les aspects jugés positifs :

• Curiosité et capacité d’apprentissage

• Prise de décision et résolution de problèmes

• Pensée innovante et créativité

Les aspects en déclin (ça fait beaucoup je trouve😅) :

• Intelligence sociale et émotionnelle

• Capacité de réflexion approfondie

• Confiance en soi

• Empathie et sens moral

• Bien-être mental

• Sentiment d’autonomie

• Identité personnelle et sens de la vie

• Métacognition (la capacité à réfléchir sur sa propre pensée)

Certains experts imaginent un futur dans lequel chaque personne dispose d’un jumeau numérique, chargé de gérer environ 75 % des tâches quotidiennes. Résultat : près de 91 jours par an libérés pour se consacrer à la spiritualité, à la créativité ou aux relations humaines. Mais quand on voit les aspects en déclin, j’ai l’impression que 91 jours ne seront pas suffisants !

Les IA deviendraient de véritables coéquipières intellectuelles : elles assisteraient dans l’analyse, l’apprentissage ou la prise de décision. En revanche, certains craignent une atrophie de nos propres capacités de réflexion critique.

Les experts soulèvent de nombreuses inquiétudes comme l’érosion possible de la confiance sociale et de l’autonomie personnelle, le renforcement de la surveillance, notamment dans les régimes autoritaires, la concentration du pouvoir entre quelques grandes entités technologiques et l’accroissement des inégalités numériques.

Pour conclure, les experts insistent sur la nécessité d’un encadrement juridique et éthique : gouvernance démocratique de l’IA, intégration participative, et régulation afin d’éviter une dérive vers un contrôle social trop poussé .

2 citations du rapport qui m’ont marqué :

🗣️Apprentissage: d’un côté, des progrès significatifs en créativité, apprentissage et prise de décision, grâce à des assistants IA sophistiqués. De l’autre, un risque de dépendance, de perte d’autonomie cognitive, et de fractures sociales et éthiques importantes. Un sujet passionnant dont on devrait parler de plus en plus dans les années à venir, pour sûr !

3.  Le come back de l’appareil photo jetable

Je vous ai déjà parlé de mon goût pour les lettres: j’aime bien en envoyer, car je trouve que ce genre d’attention est aujourd’hui sous-estimé.

D’ailleurs, j’ai envoyé une carte à la fille d’une amie la semaine dernière. J’ai eu un petit de coup de main à la maison pour décorer l’enveloppe 🙂. J’aime bien choisir un timbre un peu original (ça coûte le même prix qu’un timbre classique, il suffit juste de demander au guichet quels carnets spéciaux sont disponibles).

J’imagine que c’est le même plaisir qui me pousse, en ce moment, vers les objets un peu old school. Peut-être que c’est juste un besoin de ralentir dans ce monde où tout va trop vite. Envoyer des lettres, choisir un timbre, prendre des photos qu’on ne voit pas tout de suite… ça fait du bien.

C’est dans cet esprit que j’ai acheté des appareils photos jetables. Ceux là sont en noir et blanc, mais il y a aussi la version en couleur. J’aime cette attente entre la prise de photo et le développement. On (re)découvre les images bien après les avoir prises et l’effet de surprise est là. Avec le téléphone, on mitraille tout sans trop réfléchir, souvent en 4 exemplaires. Là, au contraire, on est obligé de prendre son temps et de réfléchir au sujet, à l’angle et à la lumière même si ça reste très simple à utiliser.

D’ailleurs, en France, les ventes d'appareils photo jetables ont connu une hausse significative: en 2023, environ 500 000 unités ont été vendues, soit une augmentation de 70 % par rapport à 2022. 

Combien ça coute ?

Un appareil de 27 poses comme celui-ci coûte environ 20 €. Ensuite, il faut faire développer la pellicule. Les prix varient selon les options choisies : développement numérique seul, ou numérique + tirages papier. Personnellement, je préfère avec le tirage papier car ça me permet de créer des albums ou d’offrir des photos en les envoyant avec une lettre. La boucle est bouclée 🙂.

Faire développer les photos revient à environ à 20 € si toutes les photos sont réussies (et ça n’est jamais le cas!).

Au final, chaque photo revient à un peu moins de 2 €, appareil et développement compris. Oui, ce n’est pas donné, mais si une photo est ratée, on ne la fait pas imprimer. On ne paie donc que pour les clichés qu’on aime et quand c’est pour faire un petit cadeau, ça reste une belle attention, sans être hors de prix.

Je trouve qu’offrir un appareil photo jetable est aussi un cadeau très cool. Pour le rendre plus sympa, on peut glisser à l’intérieur un petit bon fait main pour offrir aussi le développement des photos. On peut s’inspirer de ChatGPT si besoin :

🗣️Apprentissage: Entre lettres, photos et petites attentions, il y a quelque chose de précieux à ralentir un peu et à faire durer les souvenirs autrement. Est-ce que vous avez d’autres pratiques dans le même esprit ?

4. L’incroyable Henri Dès

J’ai récemment découvert le podcast Vieille Branche qui propose tous les 15 jours des entretiens avec des personnalités de plus de 70 ans issues des domaines de la politique, de la culture, des arts ou des idées.

Le premier « gros » concert dont je me souviens, auquel j’ai assisté étant enfant, est celui d’Henri Dès. C’est pourquoi j’ai écouté l’épisode qui lui est consacré.

J’ai réalisé à quel point cet artiste est sous-estimé.

Il a joué près de 100 fois à l’Olympia, avec une carrière de 65 ans et environ 250 chansons à son actif. Pourtant, il n’est quasiment jamais passé à la radio (sauf récemment) ni à la télévision (juste 2 fois chez Jacques Martin). C’est grâce au bouche-à-oreille uniquement qu’il s’est fait connaître.

Il a créé sa propre maison de production et a toujours imposé ses conditions, notamment des tournées limitées à 10 jours maximum pour pouvoir revenir auprès de sa famille.

Il s’est même lancé dans le métal il y a 6 ans et a joué sur la grande scène du Motocultor Festival devant 12 000 fans, se rebaptisant pour l’occasion “Henri Death”. J’ai regardé quelques vidéos, un vrai délire ! 🤣

C’est une personne simple, dont la carrière est profondément inspirante. Je vous recommande vivement ce podcast, qui montre comment cet artiste a réussi à vivre pleinement de son art, sans jamais sacrifier ni sa santé ni sa famille, et toujours avec passion.

Balaise Henri !

🗣️Apprentissage: Henri Dès prouve qu’on peut vivre de son art, sans s’épuiser ni se compromettre, avec de la constance, du lâcher prise et beaucoup de passion.

5. Adieu Gilead

Il y a des œuvres qui marquent profondément.
La Servante écarlate (The Handmaid’s Tale) en fait incontestablement partie.

J’ai d’abord regardé les 2 premières saisons de la série, puis j’ai ensuite lu le roman de Margaret Atwood (publié en 1985), que j’ai adoré. J’ai aussi lu Les Testaments, la suite écrite bien plus tard, mais je n’ai pas accroché. Une adaptation en série est dans les tuyaux.

Aujourd’hui, après avoir vu le dernier épisode de la toute dernière saison, maintenant que la série est définitivement terminée, je ressens le besoin de dire à quel point cette œuvre est puissante.

Pas de spoiler, c’est promis !

Le récit plonge dans une société où presque tout est interdit, en particulier pour les femmes. Les thèmes abordés sont lourds et profonds : la quête de justice, les dilemmes moraux, la soif de liberté, la survie dans un monde oppressant. C’est cette complexité qui rend l’histoire fascinante.

Le personnage de June, interprété de façon magistrale par Elisabeth Moss, est incroyable. Les prises de vue sont superbes. L’esthétique visuelle est extrêmement soignée. Des costumes à la symbolique des couleurs : tout participe à renforcer l’atmosphère oppressante de Gilead. Même le langage, déroutant au départ avec ses tournures bibliques, devient un révélateur de l’endoctrinement.

Les détails sont travaillés jusqu’au choix des musiques qui est très efficace. Je vous recommande d’ailleurs cette playlist qui regroupe toutes les chansons des 6 saisons.

Certains épisodes sont éprouvants mais jamais gratuits. La série ne cherche pas à divertir, elle dérange. Elle questionne. Elle oblige à regarder en face des réalités qu’on préférerait parfois ignorer.

Alors oui, toutes les saisons ne se valent pas. Il y a des longueurs, notamment dans les saisons intermédiaires. Mais, selon moi, c’est cette lenteur qui crée une tension permanente qui colle parfaitement au propos. L’histoire avance par petites touches, les réponses mettent du temps à émerger, mais cela rend chaque révélation d’autant plus forte.

Je trouve que certains épisodes de la dernière saison manquent un peu de crédibilité, notamment à cause du rythme qui s’accélère pour boucler l’intrigue. Ce n’est pas la meilleure, mais malgré ses défauts, cette série mérite à mes yeux une place dans le classement des meilleures séries. Pour sa puissance narrative. Pour sa mise en scène. Pour ce qu’elle raconte du monde. Et pour ce qu’elle nous oblige à ne pas oublier.

🗣️Apprentissage: On ne sort pas indemne de La Servante écarlate. C’est une œuvre qui laisse une trace. Je ne peux pas m’empêcher de me questionner : que ferait-on, nous, dans un monde où tout bascule ?